Un peu d'histoire


   Que regroupe-t-on sous ce vocable ?
En fait, tous les appareils qui n’avaient pas accès directement au réseau (sous entendu de l’état).
On éliminera donc les tous premiers appareils téléphoniques ou le réseau était encore balbutiant voir inexistant et l’on s’attardera sur les années 1900 1930.

      Nous sommes en 1900 et c’est (comme l'on dit en Normandie…) la croix et la bannière pour avoir le téléphone . Délais, réseaux peu développés et coût prohibitif découragent les éventuels demandeurs. Par contre, il existe chez ces mêmes clients potentiels, c'est-à-dire dans les maisons bourgeoises des systèmes de signalisations. paire de téléphones
    MignonEn effet, Il était de bon ton à cette époque d’appeler la servante ou le majordome en tirant un cordon ou en pressant un bouton qui établissait un contact. A l’autre extrémité, généralement à l’office, une sonnerie retentissait et un voyant indiquait le lieu de l’appel.


      Alors, pourquoi ne pas réutiliser cette batterie de piles et ce câblage parfois fort disgracieux (mais que ne pardonnerait-on pas à la fée électricité) pour correspondre avec les domestiques.

Kusnick        C’est ainsi que en ce début de XXème siècle, bon nombre de constructeurs de matériel électrique ajoutèrent à leur catalogue, entre les boutons d’appel en marbre et les allumoirs électriques, des téléphones simplifiés aux formes parfois surprenantes.
       Par recoupement, on s’aperçoit rapidement en feuilletant les catalogues de l’époque que peu de détails font la différence entre les différents constructeurs qui en fait, ne sont pas si nombreux.


Pherophone       Prenons par exemple, le combiné du « parisien », appareil emblématique des années 1900. Et bien, on le trouve en tête du catalogue Vve CHARRON BELLANGER, normal puisque c’est lui qui en est le concepteur, mais on trouve également un modèle pratiquement similaire dans le catalogue BOUCHERY et Cie ou il est affublé de l’appellation : Nanophone. Chez Albert Pernet, un modèle similaire porte le nom de Narrophone.


       A oui, j’ai oublié de vous dire, chaque constructeur baptise ses appareils, Soliphone, Hygeaphone, Monophone, etc... Pas facile de s’y retrouver d’autant que peu de ces appareils simplifiés portent une plaque ou une inscription.



        Sur le plan électrique, on ne peut pas faire plus simple. Micro et récepteur sont en série. Pour converser, les 2 appareils se retrouvent en série au travers d’une batterie de piles. Au raccroché, la continuité vers la sonnerie se fait par le crochet, pas terrible ! mais ça fonctionnait et ça avait du succès !

Albert Pernet
      Cette philosophie ultra simpliste oblige les constructeurs à proposer pour un même type d’appareils, différents variantes. En effet, il était inconcevable qu’un domestique appelle Madame… En conséquence, la maîtrise de la continuité du circuit, c'est-à-dire, le combiné muni d’une pédale se trouvait coté salon alors que la sonnerie et donc le combiné simple se trouvait coté office. Idem sur le plan électrique, d’un coté 2 bornes et un crochet quelconque, de l’autre coté, 3 bornes et un crochet métallique. Albert Pernet proposait même un modèle qui se résumait à une sonnerie à laquelle on avait ajouté un micro et un écouteur….

combiné d'hotel
      De là à poser une prise dans chaque pièce, il n’y avait qu’un pas à franchir. Ce qui se fit rapidement dans les hôtels ou il était de bon goût de proposer une chambre avec téléphone. Ne rêvez pas, pas question d’appeler à l’extérieur. On vous remettait tout simplement un combiné muni d’une petite fiche qui vous permettait uniquement d’appeler la réception. C’est ce genre de combiné sans patère ou applique que l’on trouve encore assez souvent dans les brocantes.

Charron Bellanger
     Le téléphone privé ou domestique comme l’appelle les constructeurs à du succès et, non seulement se développe,mais également s’améliore. C’est ainsi qu’en 15 ans, le micro du petit Parisien changera 3 fois de forme. Autre phénomène de société, le téléphone devient un objet mobile. Fini de se déplacer, on veut le téléphone à portée de la main. Et qui plus est, l’appareil doit être beau, la clochette qui servait à appeler le domestique n’était-elle pas parfois ciselée ou en cristal.


      Alors les constructeurs suivent et pour peu que l’art nouveau s’en mêle, on obtient des appareils qui sortent de l’ordinaire comme ce Parisien ou ce Phérophone qui ressemble à un jouet.
    Aux environ des années 1910, un autre phénomène apparaît : la psychose de la tuberculose. Le téléphone est alors soupçonné de véhiculer le virus. Pour y remédier, la plus part des constructeurs proposent alors un combiné en forme de cornet qu’il était conseillé de désinfecter à l’aide d’un coton imprégné de formol…. Bien évidemment les noms de baptêmes suivent. Soliphone chez Charron & Bellanger, Monophone chez SIT, Aérophone cher Berliner, Sanophone, et j’en passe des meilleurs.

Berliner

    A l’issue de la première guerre, la situation évolue rapidement. Bon nombre d’industriels et de commerçants prennent conscience du plus que la téléphonie privée peut apporter à leur entreprise. Ce qui entraîne une évolution du matériel. Sur le plan mécanique, ébénisteries et patères deviennent plus robustes sans pour autant nuire à l’esthétique. Les patères sont parfois en marbre synthétique.
    Sur le plan électrique, plus question d’établir la continuité électrique vers la sonnerie au travers de l’anneau du combiné. Le crochet commutateur fait son apparition sur ce type d’appareil, autre évolution, le bouton d’appel. Chaque poste doit pouvoir appeler la direction et à l’inverse, celle-ci doit pouvoir joindre chaque poste ce qui se traduit généralement par 3 fils ce qui était moins coûteux que de mettre une batterie de pile à chaque extrémité. Les appareils rencontrés seront généralement munis de 4 voir 5 bornes dont l’appellation varie selon les constructeurs, L pour ligne, C ou T pour le fil commun car parfois on employait la terre, C comme charbon ou P pour la pile et S pour la sonnerie.


    C’est bien beau de vouloir faire simple, mais le système a ses limites. Ainsi dans le schéma ci-dessus. Imaginons que le poste principal converse avec le poste 2 qu’il a appelé. Si le poste 3 décroche, et bien, alimenté par la même batterie de pile, il est logique qu’il entende toute la conversation. Aussi pour palier à ce problème, le matériel évolue. On intègre dans les appareils une bobine d’induction toute simple, pas question d’adaptation d’impédance, mais uniquement de séparer les alimentations. Dans les catalogues, on retrouvent ces postes équipés d’une bobine sous l’appellation « Poste à circuit secondaire » et donc par opposition, les appareils précédant sont gratifiés de l’appellation « poste à circuit primaire ».

Albert Pernet     Parallèlement à cette évolution, un nouveau système de câblage se développe : l’intercommunication. Revenons à notre premier schéma, pour que P1 puisse appeler P2 et vice & versa, il faut que P1 soit identique à P2 , soit à chaque extrémité, bouton d’appel, sonnerie et batterie de pile, ce qui à priori ne pose aucun problème. Le fil emmenant du bouton d’appel de P1 est connecté à la sonnerie de P2 et inversement, d’autant qu’en passant un fil de plus, la pile peut-être commune aux 2 appareils.

     Compliquons un peu et passons à 4 postes qui bien évidemment seront équipé de 3 boutons d’appel. Le premier poste aura ses boutons étiquetés (avec de belles étiquettes en ivoire ou en os) P2 P3 et P4. électriquement, P2 sera relié à L du 2eme poste, P3 à L du 3ème poste et P4 à L du 4ème poste. Sur le 4ème poste, P1 sera relié à L du 1er poste, P2 à L du 2ème poste et ainsi de suite, vous l’avez compris. Voila le principe de l’intercommunication qui peut aller jusqu'à 18 postes. On parle alors de ligne propre (LP) à chaque poste. Pour réaliser une installation, il nous faut donc un câble avec autant de fil + 2 (pour l’alimentation) que de poste avec parfois une petite ruse comme dans le schéma ci-dessus ou l’on a intercalé une self dans l’alimentation plutôt que d’employer des postes à circuit secondaire.

Grammont     L’emploi d’un câble multiconducteur (sous plomb isolé au papier) n’étant pas toujours possible ne serait-ce que pour des raisons financières, on en vient à la solution du tableau. Bien évidemment, celui-ci est ultra simple. Il est composé pour chaque ligne d’un indicateurs d’appel et d’une douille genre douille banane qui lorsqu’on enfonçait la fiche, non seulement on établissait la continuité vers le combiné mais on isolait également le voyant.

     Pour terminer, nous dirons quelques mots sur toute une série d’appareils tant muraux que mobiles apparus vers les années 1925/1930 chez A.O.I.P & GRAMMONT pour ne citer que ces 2 grandes marques et qui présentent quelques similitudes avec les modèles agréer pour les réseau BC à tel point qu’il est possible pour le néophyte de les confondre. Même ébénisterie, même combiné mais par contre absence de bobine d’induction et de crochet commutateur, la commutation s’effectue par l’anneau de suspension. Or-mis une qualité (et un coût) nettement supérieur aux modèles précédemment décrit, ceux-ci n’offraient pas d’autres avantages.


Petit Parisien A. Pernet A. Pernet A. Pernet Charron-Bellanger Dunyach & Lecler Berliner Berliner Grammont Grammont version murale Narrophone A. Pernet A. Wich Perfecto S.I.T. Lorry Lorry Thomson S.I.T. Brunet